« Á l’école de saint Benoît »
« Ils ne préfèreront absolument rien au Christ : qu’il daigne nous conduire tous ensemble à la vie éternelle. »
(Règle de saint Benoît ch 72)
Qui est saint-Benoît ?
Benoît est né vers 480 et mort vers 547. Sa vie nous est connue par saint Grégoire le Grand, son biographe.
Jeune homme, il étudia quelque temps à Rome, mais il y trouva une vie si décadente et corrompue qu’il abandonna vite ses études et gagna la grotte de Subiaco pour vivre en solitaire et « chercher Dieu ». De nombreux disciples étant venus se placer sous sa conduite, il les groupa dans douze monastères. Puis il quitta Subiaco et fonda le célèbre Mont-Cassin en 529. Pour organiser la vie de ses moines, il écrivit une Règle qui a joué un grand rôle dans la civilisation de l’Occident. Cette petite règle « pour les débutants » (RB, 72), résumé de tout l’Évangile, offre un art de vivre et présente le monastère comme « une école du service du Seigneur » : elle fait du moine un cénobite qui vit sa recherche de Dieu en famille avec l’aide et le soutien de frères et sous un abbé, Père et maître spirituel : « la race forte des cénobites » (RB, ch. 1).
Cette Règle se diffusa très vite au point de remplacer peu à peu toutes celles qui l’avaient précédée. Aujourd’hui encore, après quatorze siècle, elle reste le fondement de la vie monastique, tant par sa sagesse, son équilibre et sa discrétion que par ses exigences spirituelles.
Saint Benoît avait une sœur jumelle, sainte Scholastique. Le frère et la sœur s’aimaient tendrement et avaient coutume chaque année de se rencontrer dans une dépendance du monastère de Benoît. Grégoire le Grand rapporte que lors de leur dernière rencontre, Scholastique désirant ne pas quitter son frère qui ne voulait pas passer la nuit hors du monastère, obtint par sa prière un orage et une pluie torrentielle d’une telle violence que Benoît fut contraint de rester auprès de sa sœur. Leur biographe conclut : « Elle fut plus puissante parce qu’elle aima davantage ».
Qu'est-ce qu'une moniale ?
Le terme moniales-moines vient du grec « monos » qui signifie « seul ». Une moniale est une femme qui vit seule, c’est-à-dire qui choisit de vivre retirée du monde, dans la chasteté pour le Royaume, n’ayant d’autre désir que de chercher Dieu à la suite du Christ.
Qu'est-ce que « chercher Dieu » ?
Tout homme désire être heureux et tout homme désire connaître le vrai : tous nous cherchons le bonheur et la vérité. Or le bonheur et la vérité dans leur forme la plus absolue ne se trouvent qu’en Dieu seul. Voilà pourquoi la Vérité de Dieu, sa Bonté et sa Beauté sont ce que tout homme désire, le but ultime de toute vie, et donc celui du moine et de la moniale.
Nous cherchons Dieu comme le bien de notre intelligence et celui de notre volonté, voilà pourquoi nous choisissons de vivre dans un monastère pour apprendre à le connaître et à l’aimer selon le grand commandement du Seigneur : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu, de toute ton âme, de toute ta force et de tout ton esprit » (Luc 10, 27).
Si tout baptisé a vocation à chercher Dieu, le moine et la moniale choisissent d’accomplir cette vocation d’une manière radicale :
« Dans le monastère, tout est orienté vers la recherche du Visage de Dieu, tout est ramené à l’essentiel, car seul est important ce qui rapproche de Lui. » (S. Jean-Paul II)
Comment chercher Dieu ?
Par la prière, la lecture, le travail, la séparation du monde ou l’esprit de retraite et la pénitence.
La prière
Toute la vie monastique est centrée sur la prière qui est à la fois communautaire et personnelle. Une moniale prie seule dans le silence, elle prie aussi avec ses sœurs : saint Benoît écrit dans sa règle :
« Nous ferons comme l’a dit le prophète : « Sept fois le jour j’ai chanté tes louanges. » (Ps 118,164)… et au sujet de l’office de la nuit, il s’exprime ainsi : « Je me levais au milieu de la nuit pour te louer. » (Ps 118,62). Louons donc notre Créateur sur les jugements de sa justice, en ces Heures-là, à savoir : Laudes, Prime, Tierce, Sexte, None, Vêpres, Complies, et la nuit, levons-nous pour lui offrir nos louanges. » (Règle, ch. 15)
L’Office divin, Opus Dei, ou Œuvre de Dieu, est la prière de l’Église. Les moniales, consacrées exclusivement au service de Dieu, reçoivent au jour de leur profession la mission de prêter leur voix à l’Église pour célébrer l’Office divin qui occupe la place principale dans leur vie et les ouvre à toutes les intentions de l’Église et du monde. L’Office divin est réparti en huit heures liturgiques consacrant tous les moments de la journée. Il est chanté en Grégorien (latin), composé de l’Écriture (tous les livres de la Bible) et principalement de la grande prière des Psaumes, et aussi de textes des Pères de l’Église. Ces offices entourent, comme un écrin, la messe célébrée au milieu de la matinée, source et sommet de la journée monastique.
« Moines et moniales sont les chantres de la beauté de Dieu. Chanter Dieu, le louer et contempler sa beauté sans tache, c’est tout l’art du moine. » (Mère Cécile Bruyère)
« La culture sérieuse de l’Office divin fait sortir les âmes d’elles-mêmes, en se renonçant généreusement, et peu à peu les âmes vivent de Dieu et par Dieu, d’une manière simple, haute et large. La sainteté bénédictine a cette empreinte de simplicité et de largeur, parce qu’elle puise dans l’Office divin son procédé d’union à Dieu. » (Mère Lucie Schmitt)
Saint Benoît partage le temps qui n’est pas consacré à la prière entre « le travail des mains et la lecture des choses de Dieu » (RB, ch. 48).
La lecture ou lectio divina.
La lectio divina est la lecture priante et méditée de la Parole de Dieu, des écrits des Pères et de toute la Tradition. Elle prépare la moniale à l’intelligence de l’Office, elle lui permet de scruter le mystère du Dieu qu’elle cherche car « ignorer les Écritures, c’est ignorer le Christ » (S. Jérôme). Le psalmiste dit que la Parole est « lumière de mes pas et lampe de ma route » (Ps 118, 105). Parole vivante du Dieu vivant, elle est la nourriture de la moniale, son soutien et sa force.
Le travail
« Ils seront vraiment moines lorsqu’ils vivront du travail de leurs mains » (RB, ch. 48). Le travail manuel ou intellectuel occupe une part importante de la journée monastique. Accompli dans l’obéissance à l’abbesse, il permet de collaborer à l’œuvre du Créateur, d’éviter l’oisiveté, de subvenir aux besoins du monastère et d’aider les pauvres.
La séparation du monde et l’esprit de retraite
Les moniales vivent en clôture. La clôture constitue une réelle séparation d’avec le monde extérieur et manifeste que la moniale est toute à Dieu, corps et âme, dans une union nuptiale. La moniale est appelée à vivre dans ce désert claustral, non pas tant pour fuir le monde avec ses menaces et ses dangers possibles, que parce qu’elle est attirée vers cette recherche absolue de Dieu. Ce qu’elle fuit, ce sont les distractions, la dispersion, tout ce qui pourrait la détourner de Dieu.
La clôture des moniales est très expressive de ce retrait du monde, elle n’est pas la même que celle des moines parce qu’elle exprime l’exclusivité de l’amour de l’Église Vierge et Épouse : « Elle constitue un signe que Dieu tient sa créature en sa sainte garde et elle est une forme singulière d’appartenance à Lui seul, car la totalité caractérise la consécration absolue à Dieu » (Instruction Verbi Sponsa, 5).
La pénitence
La pénitence est l’expression d’un amour contrit, le mouvement du cœur humble qui désire répondre à l’amour « d’un Père plein de tendresse » (RB, Prologue) et à l’invitation du Christ : « Si quelqu’un veut venir à ma suite, qu’il se renonce lui-même, qu’il prenne sa croix chaque jour et qu’il me suive » (Mt 16, 24), pour participer à son œuvre de salut et s’unir à ses souffrances sur la Croix. Pour cette raison, le renoncement, l’effort et le sacrifice appartiennent à la vie monastique, mais toujours comme promesses de liberté et de vraie maturité : « car à mesure que l’on avance dans la bonne vie et dans la foi, le cœur se dilate et l’on se met à courir la voie des préceptes de Dieu avec une ineffable douceur d’amour » (RB, Prologue).
La vie monastique est aussi une vie de famille, une petite société où règne l’Évangile (S. Paul VI)
Saint Benoît a organisé le monastère autour de l’abbesse qui est comme une mère pour sa communauté. Elle veille aux besoins matériels et spirituels de chaque sœur et à l’unité de toutes. Notre Mère Lucie disait que les paroles de saint Paul : « Mes petits enfants, je vous porte à nouveau dans mon sein jusqu’à ce que le Christ soit formé en vous » (Ga 4, 19), résument toute l’œuvre de l’abbesse. De même qu’une mère porte son enfant dans son sein et lui imprime la ressemblance de son père et de sa mère, l’abbesse porte dans son amour surnaturel les enfants que Dieu lui a donnés afin que la ressemblance de Notre Seigneur s’imprime dans leurs âmes.